• Merci, Monsieur REISER.

    “ T’as le bonjour du printemps ” dit la chanson, et j’avoue qu’une bonne femme, cigarette au bec, qui met la main au cul d’un bonhomme hilare, ça annonce sûrement un sacré printemps.

    Période incertaine pourtant que ce printemps d’images qui peuple “ Vive les femmes ”. En avril, ne te découvre pas d’un fil, dit le proverbe. Qui, pourtant, garde sa veste à l’apparition des premiers rayons du soleil...et qui ne s’enrhume pas ?

    J’ai ressenti ces variations atmosphériques en dévorant ce recueil de courtes saynètes qui font alterner gaillardement le froid et le chaud. Ce rire franc et net que provoquent ces bouts d’hommes et de femmes, en proie au quotidien banal de leur vie ne va pourtant pas sans risque. Mais il suffit, paraît - il, d’être en bonne santé pour ne pas attraper froid. Seule la fatigue, la maladie, la faiblesse de l‘état général prédispose, d’après le corps médical, aux contaminations de toute sorte.

    REISER possède à fond l’art du croc en jambe, un peu comme BRASSENS possède à fond l’art du ricochet. Il manie le dérisoire avec l’innocence des enfants, et, si l’on prend le temps de regarder vivre les enfants...

    Mais venons en aux faits. Permettez moi de vous dire ce que fut mon voyage dans votre monde, monde gris et triste qui est le nôtre et qui devient, comme par magie, soleil et rire sous la patte d’un crayon malin et talentueux.

    Chacun de nous a dû, (devra) se reconnaître tour à tour sympathiquement ridicule (aucune dignité), proxénète fleuri, propriétaire inconséquent, (les seins au beurre noir), faible, lâche et impuissant, (papa salaud, aucune dignité), faussement libéré, (ventre chaud), voyageur infatigable dans ses rêves et impuissant dans sa vie (pincé). Les personnages (caricaturaux ?) enfermés dans leur coquille, se heurtent à perpétuité sans jamais se rejoindre (dur, l’oeuf dur), coïncidence ?...illustrations de ces grands malentendus que l’on nomme “ guerre des sexes ”, ou “ conflit des générations ” (boudin blanc, concombre) ah ! Concombre...

    Les femmes ne sont pas davantage gâtées, elles que pourtant l’album prétends fêter dans son titre. Il est vrai qu’un bémol figure à la clef, page deux, précisant : “ Quand une femme est con, même très con, elle restera quand même maligne, c’est pour ça qu’un jour, les hommes finiront par se faire avoir ”. Suit la démonstration...(boudin blanc, aucune dignité). Et le viol, qu’elles n’acceptent que légitime (viol), et la pornographie, ce beefsteak du pauvre (pincé)

    Et puis quelques enfants qui pataugent dans cette merde, qui se réveillent pour jouer à l’aviateur, qui fonctionnent comme des sonneries d’horloge pour nous rappeler .qu’il serait peut être temps d’ouvrir les yeux pour nous mettre, sérieusement, à vivre...(la scène de ménage et porno spécial).

    Et, pour finir, si vous êtes sympathique, drôle, dévoué, gentil, affable, généreux, honnête, sincère, bref, si vous venez d’une autre planète, vous risquez fort de recevoir ce coup de manivelle vengeur qui met un point final à notre solitude dérisoire.

    Je m’aperçois, en me relisant, que mon voyage dans les merveilleux dessins de REISER, ne reflète pas particulièrement l’atmosphère de l’album qui, lui, est fort réjouissant. Je m’aperçois que si j’ai annoncé ce livre comme un merveilleux printemps, j’ai surtout décrit l’hiver dans lequel se débattent les personnages.

    Il me semble pourtant que la contradiction n’est qu’apparente qu’il s’agit plutôt d’un contre point car, à mon avis, la marque du génie, c’est de réunir sous son aile toutes les saisons.

    Mon fils lit, en ce moment votre album qui reste sur la table du salon. Il sait tout juste lire et il adore les bandes dessinées. Il m’a demandé s’il était vrai qu’un pilote de ligne gagnait beaucoup d’argent. J’ai répondu que je n’en savais rien mais que c’était probablement vrai puisque c’était écrit. Il a ajouté qu’alors, il serait pilote de ligne. Chacun peut donc trouver son bonheur dans ce livre...

    Si l’on aime l’humour de REISER, impossible de pleurer sur son sort. Et, si par inadvertance, cela arrive, il suffira de se regarder dans une glace pour rire aussitôt, à gorge déployée.

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    Cette petite critique de "Vive les femmes" a plu à REISER qui m'a répondu. Je l'ai ensuite rencontré au siége de Charlie Hebdo à Paris. Je garde de cette rencontree un souvenir ému car il est mort peu de temps aprés.

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